Ils étaient presque 90 agriculteurs et agricultrices à être présents à l’assemblée générale des productions biologiques de Cavac. Malgré une baisse générale de la consommation, la diversité des filières céréales, légumes et animales et la contractualisation pluriannuelle permet de maintenir l’activité.
Une des filières la plus touchée est le porc. La baisse de la demande en porcs bio constatée après la période « covid » s’est accentuée en 2023 avec le contexte inflationniste entrainant une chute de la consommation. Une réduction collective de la production fut nécessaire pour s’adapter à cette situation difficile. Une décision prise collectivement entre les éleveurs et éleveuses. Ces mesures ont été accompagnées par la mise en place d’outils de gestion de crise (caisse de mutualisation, fonds d’arrêt élevage) qui ont impacté financièrement les éleveurs, le groupement et plus largement la coopérative.
Les protéines animales de base se maintiennent
Une diminution de la consommation est à noter en volaille de chair. Cependant la grippe aviaire a impacté fortement les volumes avec une baisse prévisionnelle estimée à 275 000 volailles en 2023 contre 600 000 en 2022. En revanche, la production d’œufs bio se maintient et répond à une consommation toujours demandeuse qui fait vivre 22 éleveurs et éleveuses.
Quant à la production bovine, le marché faisait face à une baisse de la demande en début d’année, mais reprend une santé actuellement, avec une commercialisation plus dynamique pour les 103 exploitations apporteuses, en particulier les élevages laitiers qui approvisionnent à 54 % la filière. Tout le travail mené au sein de la coopérative sur la technique pour maîtriser précisément les charges, notamment sur l’optimisation des rations alimentaires et le pâturage, permet de contenir les variations des prix, notamment celui du lait.
De bons rendements et un effet crise atténué par des produits accessibles
En cultures végétales, les rendements sont bons grâce à une météo propice. La production était de 26 573 hectares, dont plus d’un quart correspondant au blé tendre (27,8 %), suivi du tournesol (15,8 %) et du maïs (11,4 %), et l’apparition de cultures émergentes comme le colza (4,6 %) ou bien le soja (2,3 %). On pourrait parler aussi des productions spécialisées, comme les semences ou les légumes (16,2 %), ou encore le lin ou le sarrazin, qui s’inscrivent toujours dans cet esprit Cavac de diversifier les rotations culturales et les sources de valeurs ajoutées. Concernant le marché, on observe une moindre inflation des prix du bio qui réduisent l’écart avec les produits issus des autres modes de production.
« Le marché du bio s’est construit sur une stratégie de surfaces contractuelles et donc de commercialisation moins soumise aux aléas du marché, aux arbitrages financiers mondiaux, comme peut l’être le conventionnel. La filière continue de faire ses preuves notamment via la contractualisation pluriannuelle réalisée dans le cadre du partenariat avec le label de commerce équitable Agri-éthique », soutient Franck Bluteau, président du groupement bio de Cavac. Ainsi, les débouchés sont sécurisés grâce aux partenaires de l’aval et au développement de la nutrition animale bio.
Le développement vers l’autonomie en protéines se poursuit
600 tonnes de soja bio ont été produites et extrudées. Le développement de minéraux continue avec 80 tonnes, puis à partir de 2024, la coopérative pourra se fournir avec ses propres tourteaux de soja et de tournesol grâce au rapprochement avec l’usine Oleosyn Bio qui presse de l’huile végétale.
Une inflation alimentaire historique en France
L’assemblée générale s’est poursuivie avec l’intervention de Clément Lepeule du bureau d’études ADN-international, spécialisé dans les politiques publiques agricoles. Selon son analyse rétrospective, le marché du bio est l’un des marchés alimentaires qui a le plus progressé en Europe depuis 10 ans. Cette croissance est notamment due à l’essor d’une bonne exposition de l’offre en GMS, particulièrement des produits d’épicerie, les fruits & légumes, puis les oeufs et le vin.
En 2022 arrive l’inflation, dont il observe qu’elle a beaucoup plus touché les produits conventionnels que le bio. Se sont construits alors des nouveaux arbitrages de consommation, vers des changements de gamme, mais surtout une baisse historique de la consommation alimentaire en générale de 9 %.
Une des autres causes de la baisse de consommation est la confusion qui règne autour du label. « On observe des méconnaissances auprès des consommateurs français sur les caractéristiques du bio et ses garanties. Certains considèrent que les exigences du bio se sont assouplies et que les autres signes et allégations développent une confusion générale », indique Clément Lepeule.
Toutes ces causes peuvent fragiliser les filières biologiques françaises qui restent résilientes car construites sur des logiques de commercialisation et de consommation locale qui atténuent les effets conjoncturels mondiaux. Il faut donc maintenir l’activité en souhaitant un retour vers l’équilibre des prix en 2024 (projection de la Banque de France).