Le mois dernier, nous sommes allés à la rencontre du Gaec Les Patis, à Chavagnes-en-Paillers. Xavier Limousin, Alexandre Brochard, Julien Brousseau, Patrick Baudry, ainsi que Clément et Enzo, deux apprentis, nous ont ouvert les portes de leur nouveau bâtiment de 130 vaches allaitantes, à la fois ergonomique et adapté à leur l’organisation de travail.
Le Gaec aura réfléchi deux ans et demi pour bien penser le projet et imaginer une stabulation de 2 700 m² ergonomique. À l’entrée, la structure étonne par sa luminosité et sa hauteur sous toit de 7,38 m au niveau du couloir central d’alimentation. « Un des quatre associés Guy-Marie Brochard partait en retraite en juillet 2023, ce qui nous a incité à réorganiser notre système avec trois associés », explique Julien Brousseau, installé il y a quatre ans au sein du Gaec.
Du temps et du confort de travail gagné
Face à cette diminution de main-d’oeuvre, le Gaec trouvait dommage de réduire l’atelier viande avec les 70 ha de prairies à valoriser. C’est ainsi qu’une conception technique a été savamment étudiée par le Gaec pour limiter au maximum le déplacement des animaux. Par un système de cases et de tubulaires bien choisi, il suffit de quelques gestes pour déplacer le troupeau tout en limitant la manutention, et finalement pouvoir gérer l’élevage à une seule personne et en sécurité sur tout un weekend. « On ne peut pas exactement quantifier le temps de travail gagné, mais la qualité est bien meilleure, avec moins de fatigue », soutient Julien Brousseau.
La stabulation est organisée en deux lignes comprenant chacune huit cases, elle permet une gestion des animaux case par case afin de limiter les problèmes de sociabilité. Les cases à veaux sont installées sur l’arrière de l’espace des vaches allaitantes et les box de vêlage sont modulables. Les cases sont équipées de deux cornadis d’insémination qui peuvent aussi devenir des cornadis d’alimentation pour isoler les animaux. Les nombreux « passages d’homme » permettent de circuler parmi toutes ces cases avec facilité. « Aujourd’hui, les vêlages sont beaucoup moins éprouvants ! Avant, on ne fonctionnait qu’avec une seule case de vêlage. Ça nous épuisait et c’était chronophage. Là, après 130 vêlages, je suis prêt à recommencer », conclut Julien Brousseau.
La nouvelle stabulation centralise les vaches allaitantes en un même endroit et libère de la capacité d’accueil en engraissement. Car les génisses en filière contractuelle Prim’Herbe et les vaches allaitantes étaient auparavant sur le même site avec 2 périodes de vêlage, ce qui générait beaucoup de déplacement d’animaux et de manutention.
De nombreuses autres petites innovations…
Des systèmes autolock, des portes césariennes, des barrières avec passage de veaux, fluidifient grandement le travail quotidien.
Autre innovation, l’isolation du toit de 4 cm qui évite la condensation l’hiver et rafraichit le bâtiment l’été. Il y a aussi des portails coulissants tout autour qui apportent une grande luminosité et une ventilation adaptée au sens du vent. C’est un bâtiment qui respire, ce qui est d’autant plus important lorsque l’on accueil des animaux toute l’année.
Puis, il y a aussi l’éclairage led qui est équipé de variateurs de l’intensité lumineuse, des buvettes doubles, ou encore un palan sur rail pour porter les veaux. Un projet sur le fond de l’humain et de l’efficacité au travail, dont l’objectif est de pérenniser une filière de qualité de viande bovine. En effet, les places libérées dans les anciens bâtiments augmentent le cheptel en engraissement. Plus de 30 places supplémentaires dans le nouveau bâtiment, soit 130 places. À cela s’ajoute 100 places supplémentaires en jeunes bovins (200 + 100), puis 150 places pour les génisses filière Prim’Herbe (250 + 150 places).
Construire un prix, une offre et une filière en fonction des coûts de production
Ce nouveau bâtiment s’inscrit dans le développement d’une filière avec des logiques de contractualisation nécessaires pour rentabiliser l’investissement. « Le contrat tripartite que nous avons signé avec Bovineo et Carrefour est établi pour 10 ans », précise Alexandre Brochard. Le prix payé inclut les coûts de production, comme le prix de l’aliment ou de la main d’œuvre qui sont régulièrement réévalués.
La contractualisation ne sécurise pas uniquement les éleveurs mais rassure aussi leurs partenaires financiers. « Pour se lancer dans des projets de modernisation, un contrat sur 10 ans assorti d’un prix rémunérateur est une garantie supplémentaire », défend Alexandre Brochard. En effet, lorsque les associés du Gaec ont souhaité investir dans ce bâtiment, le Crédit Mutuel a soutenu le projet sans hésiter.
Tout cela s’inscrit dans la loi EGAlim 2, qui a rendu obligatoire les contrats écrits entre un producteur et son premier acheteur pour une juste rémunération et sécuriser le développement des exploitations face à la décapitalisation, la hausse des importations agricoles et l’incertitude climatique.
Pour améliorer la logique de construction des prix, la loi EGAlim 2 fixe des règles, notamment en modifiant l’article L631-24 du Code rural et de la pêche maritime qui prévoit des clauses obligatoires à insérer dans le contrat de vente : une durée minimale de 3 ans et la prise en compte de trois indicateurs dans la construction du prix. Ainsi, la contractualisation préserve l’équilibre de la filière bovin viande, car elle apporte une meilleure visibilité des volumes sur le marché pour limiter la volatilité des prix, plutôt que de produire puis de trouver un débouché.